Bête et nulle? Ou Haut Potentiel Intellectuel?
1986-1989, et récemment
Merci « toi » le soi-disant beau-père, moche selon moi… Grâce à toi, je suis tombée de Charybde en Scylla, de mes onze ans jusqu’autour de mes quinze ans environ. Un effondrement intérieur, progressif et total. J’ai entamé par « toi », bourreau maître des basses œuvres, un déficit devenu chronique de l’estime de moi, et acquis la certitude d’être bête, inintelligente, stupide et bien trop naïve. Cela grâce à ton « aide » pour réussir à échouer deux années scolaires de collège, perdre ainsi deux ans de vie intellectuelle, par tes efforts pour me rabaisser.
Qui pourrait croire qu’à mes 40 ans, je passerai un bilan psychométrique entier global-test de QI, et découvrirai que j’ai un haut potentiel intellectuel, officiellement diagnostiquée? Moi qui me suis considérée, quarante années durant, comme une sous-serpillière, car ayant l'habitude de me marcher dessus, en passant par-dessus ma nature profonde, mais aussi de me croire idiote/naïve/bête et nulle. Force sera de constater que je suis intelligente, mais que je ne le savais pas!
Période bien noire, au propre comme au figuré, pendant laquelle j’échafaudais différentes possibilité de mettre un terme définitif à ma souffrance intérieure, trop lourde à porter et impossible à assumer. Sentiment d’échec si puissant. Ajouté à la réalité d’échecs scolaires, signifiée par les deux redoublements de classe. Condamnation à redoubler, à mon corps défendant. Blessée à mort au-dedans de moi, j’estimais que je n’en valais pas la peine, me sentant coupable, même de vivre.
La misérable, comme la petite Cosette de Victor Hugo,
je me sentais crouler sous le poids de mes seaux d’eau à porter, bien trop lourds pour mes forces, et je m’étiolais et je me fanais peu à peu à subir ce poids de la honte invisible, qui me minait de l’intérieur. J’alternais environ deux années d'une période de boulimie/anorexie, symptômes de mon mal-être. J'ai gardé cependant à vie une rigidité alimentaire: ma palette alimentaire est assez restreinte, je ne mange pas de tout et presque toujours la même chose, en ce qui me concerne, je suis très "difficile".
Dans cette ombre grandissante, les arbres de la forêt étaient mes lucioles, petites lumières qui brillaient et m’attiraient hors de la maison, dans des marches-ballades-promenades qui pouvaient durer jusqu’à huit heures, une journée entière. Par monts et par vaux, dans les sentiers des forêts avoisinantes, les champs de colza jaune ou de blé tendre couleur sable, oscillants dans le vent. Le long des rivières à val, ou bien au fond de la vallée, dans la protection sylvestre des bois. Je partais seule, avec mon chien, mon coolie nain, cette race canine sereine, espiègle, mon chien des champs et de la campagne. Bienheureuse solitude non solitaire, j’étais heureuse avec mon chien. Jamais nous ne croisions d'autres chiens ou promeneurs. Tranquillité absolue et rassurante dans les bosquets de sapins. Les futaies des feuillus, qui étaient nus l'hiver, ou bruissants de feuilles au printemps. Les senteurs et les saveurs de la terre, et la sève. Le sol tapissé d'anémones Sylvie, d'ail sauvage embaumant, de primevères officinales et de vertes et grandes fougères. J'aimais aussi me balancer aux lianes suspendues aux arbres. Et écouter les chants des différents oiseaux, dans une concentration profonde, qui m'apaisait et me restaurait. J'écoutais couler la rivière et sa mélodie de vaguelettes, ondulations, douce mélopée harmonisée au son des oiseaux chanteurs. Je contemplais cette vie, minérale et végétale, l'eau, ce flot qui était pour moi comme un baume purifiant. Cette eau pure à la surface de laquelle miroitaient et scintillaient des reflets du soleil, réchauffant ma conscience. Ces expériences sensorielles positives dans la nature, par tous les temps, sous l’orage, dans la neige, le brouillard ou la tempête, avant l’aube et le départ à l’école dès 4h30 ou 5h du matin, pendant les week-ends et les vacances scolaires, furent ma planche de salut, pour me sauver de la noyade émotionnelle, et me permettre de conserver un semblant d’intégrité de moi-même.
En 2019, on m’a incitée très fortement à apprendre le Mindfullness, ce que j’ai fait d’ailleurs, la méditation de pleine conscience.
Mais en fait, je pense qu’enfant, déjà, j’ai toujours, spontanément et intuitivement, pratiqué une forme de pleine de pleine conscience, et ce depuis et dès que je suis dans la nature.
Ma bouée de sauvetage, ce furent aussi mes journaux intimes aussi, les rares à qui je parlais, en écrivant, décrivant et confiant mon vécu. Et le Yoseikan-Budo, là où il y avait les seuls contacts et relations qui m'étaient supportables et acceptables, car je pouvais en apprendre les gestes, les postures, les principes: j’avais participé au championnat suisse car «la compétition est un outil pour se tester face à un adversaire non consentant» (Swiss Yoseikan-Budo Fédération). Le TOUCHER était codifié avec une forme, un modèle et ses propres lois à respecter. Dans cet art martial, les hommes m’avaient surnommée le bulldozer ou l’ortie… car attention, je pouvais piquer si l’on ne me touchait pas «comme il faut» c’est-à-dire selon les règles du combat.
Ce fut aussi mon époque avions de chasse. J’étais fascinée et collectionnait dans un grand classeur (pas d’ordinateurs ni internet ces années-là) toutes les informations que je pouvais trouver sur les F16, entre autres. J’avais un dossier d’inscription à l’instruction aéronautique préparatoire, un grand rêve inaccompli de ma vie adolescente. Je raffolais des meetings aéronautiques. J'avais eu la chance de tenir le manche à balai d'un petit avion civil, au cours d'un vol, à côté du pilote, avec ma sœur derrière en passager. Dans les ténèbres qui m’oppressaient, j’aurais voulu voler, m’envoler et m’enfuir loin de cette terre sur laquelle je souffrais trop, chercher le ciel et sa clarté…
"Je m'appelle Émilie Jolie... je voudrais partir avec vous , tout au bout du ciel, sur vos ailes, et je voudrais vivre avec vous ma vie... Tu rêves de voler la nuit, partir rejoindre le soleil... faire un p'tit tour au paradis... Mais y a temps de choses à voir avant de partir pour le firmament. Y a tant de pages à tourner, TA VIE NE FAIT QUE COMMENCER, y a tant de jours et tant de nuits, tu es au début de ta vie... N'oubliez pas la petite fille... et si un jour je deviens vieille, j'irai par le ciel sur vos ailes au rendez-vous du paradis. Mais prends le temps de vivre ta vie, ma petite Émilie Jolie, tu sais dans les pays rêvés, les oiseaux ne sont pas pressés. Au revoir Émilie, et TOURNE BIEN TOUTES LES PAGES", Émilie Jolie, chanson finale, comédie musicale de Philippe Chatel.
Wangmo
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