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Divorce d'autiste

Dernière mise à jour : 15 juin

Demande de divorce, car papa n' a plus le temps de penser. Parce qu'autiste et Diogène?



Mon papa est Diogène, moi pas.

Je suis ordonnée et très organisée: tout est toujours bien rangé chez moi, je ne supporte pas du tout le désordre!


Contrairement à moi, qui ne suis que HPI, papa est THQI, Très Haut Quotient Intellectuel: tout le monde le considère comme une pointure intellectuelle, une encyclopédie vivante. Il a une mémoire phénoménale, au-dessus de la moyenne, et une culture considérable.


Très étonnamment, son métier était plutôt fait de beaucoup de chômage, à répétition, malgré son si haut potentiel intellectuel... :


«Il y a probablement un pourcentage d’Asperger chez les chômeurs chroniques» (Tony Attwood, 2013, Le syndrome d’Asperger).

En fait, il était journaliste-pigiste, mais il avait continuellement des échecs professionnels, en tombant de plus en plus bas, dans l’échelle sociale, avec les années. Et cela, alors qu’il avait gagné un concours d’édition, où ils étaient 300 participants, à l’issue duquel ils n’ont pris que très peu de candidats ayant réussi. Ce qui lui avait donné la possibilité de faire son apprentissage, au journal de l’un des plus grand hebdomadaire suisse, en Suisse romande. Apprentissage qu’il a fait, devenant journaliste. C’est à la fin de son apprentissage que l’ATS, l’Agence Télégraphique Suisse (équivalent de l’APF: Agence France Presse) lui a offert une place en Suisse alémanique, parce qu’il était parfaitement bilingue.


A ce moment, il a dit à sa femme, ma maman, très tristement:


«Je suis condamné à réussir; je n’aurai plus le temps de penser».


Il a ainsi réussit à saboter son premier emploi, en partant en Pologne le jour de son embauche, et en se présentant au travail trois jours après la date…


Verdict: licencié, avant même d’avoir commencé.



AUJOURD'HUI:

Papa vient d’être diagnostiqué

avec un trouble du spectre autistique

TSA SDI

à 76 ans,

après deux mois d’hôpital. 

Ceci explique-t-il cela?


Cela ne justifie pas son irresponsabilité, mais, humainement, cela pourrait être une grille de lecture, possible et légitime, quant à son incapacité à assumer une charge de famille, avec un travail pour prendre soin des siens.


De façon surprenante, car en décalage total avec son intelligence, papa, sous stress, est saisi de logorrhée et perd ses moyens. Il peut alors ne pas réussir des tâches simples, avoir une baisse de performance mentale, comme des autres aptitudes d’ailleurs.


Dans la vie quotidienne, il a toujours eu du mal à gérer. Que ce soit pour planter un clou, faire la cuisine ou gérer les dossiers et factures, les repas, les courses, ...

Il ne faisait aucun travaux ménagers, ni petits bricolages, ni cuisine;

c’est-à dire qu’ il a peu, voire pas d’intelligence pratique,

dans la vraie vie, réelle et non-intellectuelle.


En voici un exemple ci-dessus, avec son licenciement décrit:

licencié avant même d’avoir commencé à travailler.


Papa est fascinant intellectuellement (pour ceux qui partagent ses intérêts spécifiques), d’une grande gentillesse et sensibilité, mais il est difficile à vivre, notamment à cause de son syndrome de Diogène, en plus de son trouble du spectre autistique.


Josef Schovanec établit un lien entre l’Asperger-AUTISTE-verbal

et le syndrome de Diogène.


Cette citation me paraît bien décrire mon papa:

«[…] les individus atteints du syndrome de Diogène, ont la plupart du temps, une personnalité exceptionnelle, qui peut être marquée par une intelligence au-dessus de la moyenne, un caractère fort, une personnalité riche et complexe, parfois même attirante ou séduisante mais la plupart du temps très difficile à vivre».


Très difficile à vivre, au quotidien…et pour l’entourage. Dans le cercle des proches, qui doivent tout faire pour lui, et à sa place, lui, n’ayant au final pas d’autonomie.


En relisant ces lignes,

je me rappelle avoir entendu,

toute ma vie, déjà,

les deux raisons de la demande de DIVORCE de maman:


1. papa ne rangeait jamais rien, il fallait tout faire à sa place pour lui et il n’était pas capable de subvenir aux besoins d’une famille; d’ailleurs il n’a jamais payé la pension alimentaire pour ma sœur et moi...

2. il restait dans sa bulle et la tête dans ses livres; il n’y avait pas de réciprocité dans la relation…



Aujourd’hui,

comme indiqué plus haut,

papa a été diagnostiqué

premièrement Diogène (2020) et

deuxièmement autiste-Asperger (2023).


Autrement dit, de mon point de vue, et comme le relatait maman, elle a divorcé:


d’abord, parce que papa était Diogène,

et impossible à vivre avec son bazar de livres et journaux partout.

Et ensuite, parce qu’il était Asperger-autiste,

même si personne ne le savait en 1978.


Papa était-il incapable et inapte…

ou juste comme «handicapé»?


Bien sûr, l’autisme n’est pas, ni une maladie, ni un handicap.


L’autisme est un trouble neuro-développemental.


Mais… il n’empêche que chez papa, entre son très haut potentiel intellectuel THQI + son syndrome de Diogène + cumulé avec son syndrome d’Asperger: et bien, cela l’a réellement handicapé, durant son vécu, et dans sa vie, ordinaire concrète, de tous les jours.


Je ne peux m’empêcher de me demander:


«Qui et comment cet homme, bon, si doux, passionnant dans ses intérêts spécifiques; comment cet homme serait-il devenu, aurait-il vécu, s’il avait été, un tant soit peu, reconnu, diagnostiqué, accompagné et un minimum aidé, selon sa triple spécificité de THQI qui n’est pas un trouble, son Diogène et son TSA(autisme) SDI…?


Je reprends encore les propres mots de maman, lorsqu’il avait voulu se justifier de son absence à son rendez-vous d’embauche: «Je n’aurai plus le temps de penser...».


Comment expliquer cette phrase, que personnellement et intrinsèquement, je comprends parfaitement…?


Adolescente, maman arrivait parfois dans ma chambre, elle me trouvait assise sur mon fauteuil. Elle me demandait ce que je faisais, ne voyant pas de livre sur mes genoux, n’entendant pas de musique dans ma chambre. Je lui répondais la vérité:


«Je pense, maman».


Je conçois tellement bien que l’on puisse avoir peur de ne plus avoir le temps de penser.


Penser est en quelque sorte une activité à part entière pour moi, je ne sais pas très bien comment, ni mieux, décrire cela...

Je peux, encore adulte, rester assise des heures quelque part, sans m’ennuyer et sans rien faire, apparemment, juste penser.

Parfois mes proches commencent à montrer des signes d’ennui, lorsque cela dure trop longtemps, mais pas moi, jamais.


Ce qui m’apparaît limpide aujourd’hui, c’est que ces longs temps de pensée, ceux de mon papa ou les miens, sont des moments comme de «digestion», et sont surtout vitaux. Temps capital pour digérer l’information, la comprendre, lui donner sens. Laisser descendre le trop-plein de sensations, de stimuli et laisser ensuite monter les émotions, qui apparaissent souvent après, et non pas sur le moment, donc en décalé face à l’événement.


Lorsque papa disait: «Je n’aurai plus le temps de penser», ne signifiait-il pas simplement, instinctivement, qu’il pressentait avoir un besoin vital:

comme si ses lobes frontaux devaient se fermer,

et ses fonctions exécutives

(nécessaires aux relations sociales, qui en consomment beaucoup)

se mettre en PAUSE?

Est-ce que cela ne serait pas normal?

Car c’est ce que font les personnes avec autisme,

et c’est une manière pour leur cerveau de préserver leur survie, rien de moins.


Ma sœur

parle d’un travail essentiel pour les autistes:

la pensée.

Elle écrit pour les Aspi:


«Penser,

un travail indispensable sous peine de faire «bugger» la machine cerveau.


Le processus cérébral met les ressources nécessaires pour traiter les données.

Besoin de comprendre: le cerveau tourne en boucle, analyse, met en lumière, organise les pensées, classe, éclaire, rumine et peut-être va jusqu’à mettre par écrit, parfois ou pour certains Asperger.

Processus nécessaire, lorsque quelque chose «chiffonne» par exemple: être incapable de penser à autre chose, obnubilé à tout instant avec ce besoin irrépressible d’y dédier du temps de pensée. Cela peut prendre des jours, des semaines, des mois. Puis un jour, le dossier est traité, organisé, bien rangé. Et on peut passer à autre chose.

Ce serait contre-nature de dire à une personne TSA SDI de ne plus penser. Ne pas prendre en compte le fonctionnement spécifique de la personne, donc vouloir lui imposer un changement qu’il ne comprend pas, ne valide pas = violence. C’est violent de dire à quelqu’un «Tu te trompes, ne soit pas ainsi».

C’est destructeur» m'écrit ma sœur.


(Selon une explication, ce qui est décrit ci-dessus serait une question de TEMPS de traitement de l'information dans un cerveau autiste, notamment).


Wangmo



ps: Sur internet, avec mon accord

Maya lit mon texte ci-dessus dans son podcast:


Chroniques du TSA de Maya


Son podcast aura un autre épisode avec son témoignage sur

autiste sénior et Ehpad,

dans Chroniques du TSA,

de Maya:





Précision: voir LEXIQUE sur Aspi/Asperger dans MENU



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